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Civelles de repeuplement deviendront grandes

31 octobre 2023

Les opérations de repeuplement en civelles s’évaluent. Une obligation inscrite dans le plan européen de gestion de l’anguille instauré en 2010. Sous l’égide d’Ara France, le muséum national d’histoire naturelle, le centre de géoécologie littorale, le bureau d’études Fish-Pass se sont attelés à l’analyse des données de recaptures.

Dans certains cours ou plans d’eau, les déversements de civelles ne viennent peut-être pas grossir les populations résiduelles, mais les anguilles repêchées, plusieurs mois ou plusieurs années après leurs lâchers, sont, en grand nombre, issues de ces opérations de repeuplement. En d’autres lieux, là où les densités d’anguilles étaient jusqu’ici faibles, l’alevinage contribue à l’augmentation des populations. Quoi qu’il en soit, les civelles déversées représentent entre 10 et 90 % des effectifs de la population d’anguilles autochtone. Ce sont trois enseignements de l’étude sur l’analyse des données des repeuplements en civelles effectués entre 2011 et 2021, menée par Éric Feunteun, du muséum national d’histoire naturelle-Cresco, Bruno Serranito de l’école pratique des hautes études et du centre de géoécologie littorale, et Yann Le Péru du bureau d’études Fish-Pass, à l’initiative de l’association pour le repeuplement de l’anguille en France (Ara France).

Marquage à l’otolithe

Depuis 2011, 14 des 29 tonnes de civelles déversées lors de 48 opérations de repeuplement, ont été marquées à l’alizarine, colorant indélébile se fixant sur l’otolithe, concrétion minérale située dans l’oreille interne des poissons. Et, plan de gestion oblige, pas de repeuplement sans suivi. Chaque zone d’alevinage a donc fait, conformément au protocole, défini conjointement par l’Office français de la biodiversité (OFB) et le muséum national d’histoire naturelle, l’objet de trois campagnes de captures, en pêches électriques ou aux verveux, 6 mois, un et trois ans après les déversements, un protocole que les « pêcheurs » ont parfois adapté, en étendant les zones de captures au-delà des 1 km en amont et en aval des zones de déversements prévus.

Localisation des 70 opérations de repeuplements en civelles réalisées entre 2011 et 2021 dans le cadre du programme national de gestion des anguilles et coordonnées par le ministère de la Transition écologique.

Entre 2010 et 2023, 105 projets de repeuplement en civelles ont été menés en France.

Alizarine argentée

Les civelles ne vivent pas forcément leur vie d’anguilles là où on les dépose, et il prend, quelques années plus tard, à certaines d’entre elles, devenues adultes, de migrer vers la mer des Sargasses pour se reproduire. En 2018, les premières anguilles argentées, aux otolithes marqués à l’alizarine, étaient pêchées en Loire. « La poursuite de l’analyse de l’efficacité du programme de repeuplement français sur la période d’étude consisterait à estimer la quantité (nombre et biomasse) des géniteurs produits par le transfert des 29 tonnes de civelles entre 2011 et 2021 par rapport à ce qu’elles auraient produit si elles avaient colonisé les bassins versants par leurs propres moyens. Des premières analyses, non présentées dans cette étude, indiquent que le programme français de repeuplement permettrait un gain substantiel de production en anguilles argentées, pouvant contribuer de 5 à 10 % aux flux migratoires » concluent les auteurs.